Mise en examen dans l'enquête sur le crash du vol Rio-Paris, en 2009, la compagnie a lancé un vaste projet pour rendre ses opérations plus sûres. Un travail de longue haleine. Confortablement installé à bord d'un avion qui l'emmène à Beyrouth pour signer un accord avec Middle East Airlines, Pierre-Henri Gourgeon affiche sa sérénité en ce dimanche 27 février 2011. Près de deux ans après la catastrophe du vol AF 447 Rio-Paris, le directeur général d'Air France-KLM préfère mesurer le chemin parcouru par la compagnie en matière de sécurité.
Au moment où commence la dernière campagne de recherches de l'épave de l'appareil - trois phases de trente-six jours chacune -, sous l'égide de la Woods Hole Oceanographic Institution, le patron du groupe franco-néerlandais est plus que jamais déterminé à poursuivre les efforts engagés dès la fin de 2009. Et à appliquer les 35 recommandations formulées au début de cette année par une mission d'audit externe confiée en décembre 2009 à huit experts indépendants, sous la direction d'un ancien de Boeing. Qu'importe la mise en examen de la compagnie, le 18 mars, pour homicides involontaires.
"Nous voulons devenir les meilleurs sur tous les axes de la sécurité", insiste Gourgeon. L'objectif est pour le moins ambitieux. A la hauteur du traumatisme subi à la suite de l'accident survenu, le 1er juin 2009, entre Rio et Paris. Profondément ébranlée, la compagnie s'est lancée dans un vaste chantier d'amélioration de sa sûreté. Sans même attendre les conclusions de la mission externe, publiées en janvier 2011, elle a mis en place, dès le début de 2010, le groupe Trajectoire, chargé de plancher sur une révision totale du "process" des vols. Un projet mené en étroite collaboration avec les pilotes sous la férule d'Eric Schramm, nouveau patron de la sécurité, lui-même commandant de bord très apprécié de ses pairs. Schramm a commencé par aller voir 62 transporteurs aériens. L'objectif : "Se comparer à une compagnie virtuelle parfaite." Et s'en approcher le plus possible. Une volonté saluée par tous : "Ils ont un problème de "safety", ils le reconnaissent, c'est déjà bien", lâche un pro du secteur.
Des observateurs embarqués pour identifier les erreurs
Parmi les premières décisions prises, l'adoption par Air France du Losa (Line Operations Safety Audit), un outil conçu à l'université d'Austin (Texas), largement utilisé par les compagnies américaines et asiatiques. Ce procédé d'analyse des vols consiste à embarquer des pilotes observateurs chargés d'identifier les erreurs de leurs collègues. 30 "contrôleurs" sont ainsi en mission de début février à fin mars. L'opération sera renouvelée tous les deux ans. "Nous sommes la première compagnie européenne à le faire", se félicite Eric Schramm, soulignant l'adhésion du personnel navigant technique à cette mesure. "Il y a quelques années, une telle procédure aurait été impensable", souffle Louis Jobard, patron du Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL), majoritaire à Air France. Une caste jusque-là seul maître à bord après Dieu. Avant, c'était "touche pas à mon protocole", admet l'un d'eux.
Des experts au sol pour assister les équipages
Autre mesure emblématique décidée en septembre 2010 : l'emploi, dans le cockpit, des documents de vol du constructeur, rédigés en anglais. Au grand dam du syndicat minoritaire Alter. Auparavant, ces manuels étaient récrits et adaptés en français, à la mode Air France. "C'était la tradition. Mais le document, tel quel, est plus simple et plus compréhensible par le pilote", plaide Pierre-Henri Gourgeon, conscient d'avoir "brisé un tabou". Air France a également créé un corps de "dispatchers", des experts intervenant, à partir du sol, en soutien opérationnel des équipages pendant le vol. Ils entreront en fonction à partir d'avril et seront 140 d'ici trois à quatre ans. "Avec ce dispositif, nous allons au-delà de la réglementation", assure Eric Schramm.
Le travail engagé ne devrait pas s'arrêter là. Dans ses recommandations, la mission externe, qui dresse un état des lieux sans concession, va encore plus loin : elle préconise un changement complet d'organisation et de mentalité. Sans ménagement, elle fustige "une minorité de pilotes" qui prennent des libertés avec la réglementation et adoptent des attitudes "arrogantes et autocratiques". Les huit experts - dont sept Anglo-Saxons - n'oublient pas non plus la direction d'Air France et ses structures hiérarchiques trop complexes, qui ont largement contribué à diluer les responsabilités. Ils s'étonnent que la compagnie n'ait pas eu un seul dirigeant responsable des questions de sécurité reportant directement au PDG. Ils se félicitent de la création d'un comité sécurité au conseil d'administration - leur recommandation n° 1. Mais pointent la nécessité d'une meilleure collaboration avec les autorités de contrôle telles que la Direction générale de l'aviation civile.
Malgré ses efforts, la direction rencontre des résistances. "Si c'est une révolution, elle est bien tranquille", ironise François Hamant, président du syndicat de pilotes Alter. Selon lui, la mise en oeuvre de la nouvelle organisation "progresse très lentement". D'autres reprochent à la compagnie de tergiverser : elle se refuse, par exemple, à sanctionner les dirigeants défaillants comme les pilotes "autistes". A sa décharge, "ces modifications sont lourdes et compliquées", défend un salarié. "Un changement de culture ne se fait pas d'un coup de baguette magique", plaide Louis Jobard. "Air France a repris un peu d'avance. Il ne faut pas lâcher", prévient Gérard Feldzer, expert aéronautique. Ni baisser la garde. "Comment le pourraient-ils ? lance un salarié. Toutes ces mesures, très médiatisées, ne peuvent pas finir dans la poubelle !" Le rapport Colin, rédigé après l'accident de Toronto, en 2005, et resté largement lettre morte, sert d'exemple à ne pas suivre. Cette fois, Air France semble bien décidée à réussir sa mue.
Source : L'Express - Corinne Scemama - 23 mars 2011
Sécurité des vols : Ce rapport qui pointe les failles d'Air France
La compagnie nationale dispose de deux ans pour se remettre au niveau des standards mondiaux de la sûreté aérienne. Faire plus simple, c'est la première conclusion que l'on retient à la lecture du rapport sur la sécurité rédigé par des experts externes à Air France que Le Point.fr s'est procuré. Cet audit, qui comporte trente-cinq recommandations en annexe, avait été commandé en décembre 2009, six mois après le crash du Rio-Paris. L'objet d'un tel rapport n'est pas d'identifier dans l'entreprise des procédures, des comportements ou des responsabilités qui auraient pu amener indirectement à l'accident de l'AF 447. Il s'attache à analyser la sécurité à la fois en tant que culture et concept global dans la compagnie, mais aussi dans le comportement quotidien du personnel qu'il soit navigant ou non.
Des commandants de bord autocratiques
Phénomène fréquemment rencontré dans les entreprises classiques, au lieu de sanctionner directement les responsables de comportement anormaux, on édicte à tous des règlements complexes censés encadrer ces débordements. À Air France, une minorité de commandants de bord prennent des libertés avec les procédures, partant du principe qu'ils sont seuls maîtres à bord en dernier ressort. Mais les excès de ces ayatollahs peuvent transgresser les normes de sécurité. Ce sont généralement les mêmes qui font preuve de comportements autocratiques avec les autres collaborateurs de la compagnie, personnel navigant commercial (hôtesses et stewards), personnel au sol, mécaniciens, etc. Conséquence de cette dégradation des relations humaines, ces vols ne se déroulent pas dans le climat de sérénité propice à l'optimisation de la sécurité. La recommandation 23 suggère de définir explicitement les circonstances dans lesquelles un commandant de bord peut ainsi exercer un pouvoir discrétionnaire.
Pas de négociation syndicale sur la sécurité
Les relations de la direction avec les syndicats, avec le souci majeur de préserver la paix sociale, sont analysées avec ses conséquences sur la mise en oeuvre de la politique de sécurité. Plusieurs recommandations concernent d'ailleurs les rapports avec les organismes professionnels. Il est demandé que les règles de sécurité sortent du cadre des négociations syndicales, mais fassent l'objet de débats élargis. Une formation sur la sécurité pourrait être dispensée aux représentants syndicaux. Il est même proposé que tous les syndicats d'Air France se retrouvent sur un forum internet unique consacré à la sécurité.
Air France devrait favoriser le recrutement et la formation au sein de la direction des opérations aériennes de pilotes appelés à prendre plus tard des responsabilités de managers, pointe le rapport. Un peu plus de transparence est demandé lors de la désignation des instructeurs. Il est clairement stipulé que l'anglais doit être la langue de référence des ouvrages techniques et des manuels d'opérations. Les documents traduits, voire interprétés comme l'ont été certains manuels de vol des constructeurs d'avion, sont à exclure. La loi Toubon, censée protéger l'usage du français, n'a donc pas sa place dans les cockpits où la sécurité des vols est prioritaire. Cela passe par l'usage d'une langue internationale unique, également référence de l'industrie aéronautique.
S'il y a le moindre doute sur une décision qui, au nom de l'efficacité ou des impératifs commerciaux, pourrait aliéner la sécurité, cette dernière doit être privilégiée et le personnel concerné doit savoir comment résister aux pressions, recommande l'item 28.
Une structure lourde trop lente à réagir
Globalement, la structure d'Air France en matière de gestion de la sécurité se révèle trop complexe, même si elle répond aux règles fixées par les administrations de tutelle française et européenne. Conséquence, il peut y avoir dilution des responsabilités et lenteur de correction. Le rapport préconise de créer un sous-comité "sécurité" au conseil d'administration qui mettra en place un certain nombre d'indicateurs de performance dans ce domaine. Il doit s'intéresser aussi aux filiales comme BritAir, Regional, CityJet, etc.
Cette complexité de la structure induit une lourdeur dans la remontée de l'information sur des incidents, bien ancrée chez les cadres, mais qui apparaît moins nettement sur le terrain. Le rapport incite la compagnie à développer des méthodes prédictives d'identification des risques. Un des outils s'appuie sur une analyse systématique de tous les vols grâce à un enregistreur présent sur les avions, indépendant des boîtes noires. Les paramètres de pilotage sont lus au sol par un logiciel qui détecte les anomalies de manière anonyme. L'objectif n'est pas de sanctionner, mais d'améliorer la sécurité en adaptant les thèmes du programme de formation permanente au simulateur où chaque pilote s'entraîne tous les six mois. Par exemple, des écarts observés peuvent inciter à s'exercer à une meilleure stabilisation de la vitesse lors de l'approche avant l'atterrissage. Aujourd'hui, ce retour d'expériences en ligne n'arrive pas assez vite dans les cockpits de simulateur pour remise à niveau.
Création du métier de facilitateur
Présidé par R. Curtis Graeber, ancien ingénieur chez Boeing, ce comité de huit experts à forte dominante anglo-saxonne reflète la culture de la sécurité outre-Atlantique. Celle-ci est très attachée aux facteurs humains dans un équipage de pilotes, comme dans une équipe plus large, celle réunissant les nombreux corps de métier nécessaires pour mettre en oeuvre un avion. Air France se donne deux ans pour transposer ces recommandations. Une première mesure transversale a été annoncée par Pierre-Henri Gourgeon, directeur général, avec la création de la fonction de dispatcher, un expert polyvalent apportant son soutien aux vols long-courriers comme moyen-courriers. Ce facilitateur sera chargé d'épauler l'équipage dans toutes les phases de vol et de faire en sorte que les imprévus ne troublent pas la sérénité du voyage.
Source : LePoint.fr - Thierry Vigoureux - 27 janvier 2011
Le SNPL AF ALPA se dit ''satisfait'' et ''vigilant''
La mission d’expertise externe sur la sécurité des vols créée à Air France, sous l’impulsion du Syndicat SNPL AF ALPA. rendait ses résultats ce lundi 24 janvier 2011, au CMP (Comité Mixte de Proposition), au sein duquel siège le Syndicat.
Lors de cette présentation, 35 recommandations étaient décrites. "Le SNPL AF ALPA se satisfait que ces mesures soient sans complaisance, ce qui confirme la qualité du travail effectué.
Le SNPL AF ALPA, moteur dans la création de cette mission d’expertise externe, ainsi que dans celle du programme Trajectoire et du CMP, sera vigilant quant à la mise en place de ces mesures.
Le SNPL AF ALPA se félicite par ailleurs que la Direction ait pris l’engagement que les mesures proposées par la mission externe et validées par le CMP soient mises en oeuvre."
Source : TourMag.com - 25 janvier 2011
Sécurité des vols : Des observateurs à bord des vols d'Air France
Le rapport d'experts présenté en interne fait 35 recommandations pour améliorer la sécurité des vols. Il préconise une étude sur les erreurs des pilotes, qui débutera en février, et insiste sur la formation des personnels techniques navigants.
Vingt mois après le drame du Vol Rio-Paris, la sécurité des vols reste un sujet hypersensible chez Air France. Pour preuve, la compagnie n'a pas jugé bon de dévoiler dans le détail le contenu du rapport remis par la mission d'expertise externe chargée de réfléchir aux moyens de renforcer la sécurité.
A notre connaissance, le document présenté ce lundi aux syndicats de personnels navigants n'a pourtant rien d'une bombe. Air France souligne ainsi dans un communiqué que la mission externe, créée en décembre 2009, «n'a relevé aucun écart de conformité par rapport à l'application des réglementations en vigueur». Le rapport ne comporte pas non plus la moindre information relative à la catastrophe du 1er juin.
Les experts internationaux, au nombre de huit, se sont contentés d'élaborer 35 propositions pour améliorer les sécurité des vols, en s'inspirant de ce qui se fait déjà ailleurs. Leur travail s'inscrit dans un chantier plus vaste, lancé en interne début 2010 par le nouveau directeur des opérations aériennes Eric Schramm, visant à «moderniser» les procédures de sécurité d'Air France dans le cadre d'un projet d'entreprise baptisé «Trajectoire».
Un tableau de bord de la sécurité
«La plupart des recommandations seront mises en oeuvre rapidement», affirme la compagnie. Certaines l'ont déjà été, comme la mise en place d'un tableau de bord de la sécurité, destiné au comité de suivi institué l'an dernier au sein du conseil d'administration d'Air France. Autre proposition-phare: l'adoption d'une procédure d'analyse des erreurs de pilotages, selon la méthode Line Operations Safety Audit» (Losa), élaborée par l'université d'Austin, au Texas. Déjà pratiquée par les grandes compagnies américaines, comme Delta, elle consiste à embarquer des pilotes observateurs pendant les vols, afin d'identifier les erreurs le plus fréquemment commises, selon une grille d'analyse préétablie.
Selon les statistiques de Losa, un pilote commet, en moyenne, sept erreurs par vol d'une heure, la plupart du temps sans conséquence. Reste à savoir lesquelles. La grille d'analyse Losa comporte en effet plus de 15.000 items. Une trentaine de pilotes d'Air France ont donc été formés pour procéder à cette étude, qui débutera en février et durera deux mois, pour un rapport début juillet. Celle-ci sera renouvelée dans deux ans, pour mesurer les progrès accomplis.
Améliorer la formation
Autre point potentiellement polémique: le rapport insiste aussi sur la nécessité d'améliorer la formation des cadres PNT (personnel navigant technique). Ce qui apporte de l'eau au moulin de ceux qui, en interne, avaient mis en cause l'encadrement des pilotes d'Air France. La polémique avait même conduit à l'annonce anticipée du départ du directeur des opérations aériennes, Gilbert Rovetto. Sans rentrer dans cette polémique, les experts préconisent la mise en place d'une véritable filière de formation managériales des pilotes et des chefs-pilotes, afin de renforcer le management de la sécurité.
En revanche, ils ne s'engagent pas sur le sujet le plus sensible: la possibilité de sanctionner les pilotes responsables d'erreurs à répétition. Un pas qu'ont franchi certaines compagnies, mais qui reste tabou chez Air France.
Source : Les Echos – Bruno Trévidic – 25 janvier 2011
Sécurité des vols : Opération vérité dans les cockpits
Le patron, Pierre-Henri Gourgeon, annonce des réformes et un renforcement de la «culture de la sécurité».

Pierre-Henri GOURGEON. - Nous avons annoncé à l'été 2009 que nous allions demander à une mission externe de nous aider à faire progresser notre sécurité. Notre ambition est de prendre le meilleur de ce qui se fait chez chacun de nos concurrents et de l'appliquer. Le jour où nous ferons tout ce qui se fait de mieux, ce que personne ne fait aujourd'hui, nous pourrons dire que nous serons arrivés à notre objectif: porter notre performance en matière de sécurité des vols au plus haut niveau possible de l'industrie. Permettez-moi également de préciser qu'il ne s'agit pas du tout d'un audit: nous sommes, dans tous les domaines, au niveau des standards de sécurité et des normes internationales. Notre ambition a justement été de remettre à plat notre organisation et de voir où nous pouvions nous améliorer, au-delà des règles de base appliquées par tous.
Cette mission est-elle liée à l'accident du vol AF 447 ?
Il est certain que la tragédie de l'AF 447 a créé un désir d'évolution au sein de la direction, mais aussi de l'ensemble du personnel. Les recommandations du rapport ne traitent pourtant absolument pas de cet accident dont nous ne connaissons aujourd'hui pas encore les causes. C'est la première fois que des experts de l'extérieur viennent ausculter une compagnie et ont accès à l'ensemble de ses services. Nous avons accueilli huit spécialistes incontestés à dimension internationale. Ils ont pu émettre 35 recommandations sur trois thèmes fondamentaux: notre organisation, notre culture et les responsabilités individuelles. Nous allons en appliquer la plupart.
Quelles sont les grandes réformes qui vont être lancées?
Nous allons par exemple créer une nouvelle chaîne au sol d'assistance des vols avec un métier auquel nous voulons donner une dimension nouvelle: le métier de «dispatcher». C'est un expert technique qui interviendra en soutien opérationnel permanent de nos équipages dans toutes les phases du vol. Ce métier sera déployé sur l'ensemble de nos vols long et moyen courriers. Nous allons doter ces spécialistes des meilleurs outils informatiques disponibles sur le marché. Cela représente un effort considérable d'investissement de la part d'Air France. Ce nouveau dispositif entrera progressivement en service chez nous dès la fin de l'été, et tous les vols de la compagnie seront concernés d'ici deux à trois ans. Il renforcera la sécurité de nos vols, mais aussi la robustesse de nos opérations et la réactivité en cas d'aléa.
L'équipe internationale à forte composante anglo-saxonne a sans doute remarqué des spécificités culturelles dans l'organisation de votre compagnie.
Le sujet des syndicats, de leur nombre ainsi que des grèves a été évoqué par la mission externe. Au Royaume-Uni et en Allemagne, vous avez un syndicat unique de pilotes qui peut débattre des dossiers de sécurité avec la direction de l'entreprise sans enjeu électoral. En France, c'est culturellement plus compliqué. Pour en tenir compte, nous avons créé un comité mixte de propositions où siègent tous les syndicats de pilotes et où sont discutées toutes les mesures de sécurité dans un esprit de coopération professionnelle.
Qu'allez-vous faire pour améliorer la qualification de vos pilotes?
Nous allons mettre en place une mesure qui, socialement, ne serait jamais passée il y a quelques années, mais qui a été acceptée par nos pilotes, qui font ainsi preuve d'un grand courage et d'une véritable humilité. Le Line Operations Safety Audit (LOSA) va conduire une trentaine de pilotes de la compagnie à s'installer dans nos cockpits jusqu'en mars 2011 et à observer tout ce qui s'y passe, pour améliorer l'ensemble de nos règles de sécurité et de fonctionnement. Air France est la première grande compagnie européenne à mettre en œuvre ce programme d'observation, qui, au-delà des pilotes, touche l'ensemble des métiers de la compagnie.
La direction de l'entreprise et plus largement la gouvernance sont-elles sujettes à perfectionnement?
Oui, nous avons créé un comité de sécurité des vols au sein du conseil d'administration. C'était d'ailleurs une des recommandations préliminaires de la mission externe. L'existence de ce nouveau comité permet de suivre au plus haut niveau de l'entreprise tous les indicateurs de sécurité. Nous avons également nommé un responsable de la sécurité au niveau du groupe Air France. Cette personne sera chargée de contrôler l'application de nos standards de sécurité au sein de nos filiales: Britair, Regional et Citijet. D'une manière générale, nous devons créer davantage de passerelles entre les services et faire en sorte que la culture de la sécurité soit plus forte, y compris chez les personnels au sol.
L'enquête sur l'AF 447 vous conduira peut-être à prendre de nouvelles mesures. Êtes-vous optimiste alors que va démarrer une nouvelle campagne de recherche de l'appareil ?
Nous espérons que le fuselage sera retrouvé, car nous souhaitons absolument savoir ce qui s'est passé. Les gens qui travaillent sur cette campagne sont très optimistes, mais ils l'étaient déjà lors de la campagne précédente. Il faut donc rester prudent. Va-t-on retrouver les boîtes noires de l'avion? Saura-t-on les exploiter? Comprendra-t-on vraiment ce qui s'est passé? Il est difficile de répondre a priori par l'affirmative à ces trois questions, mais c'est notre souhait. Cet accident a été un vrai deuil pour notre groupe. En réaction à cela, nous tous, pilotes, hôtesses et stewards, mécaniciens, personnels au sol, à tous les niveaux hiérarchiques, nous avons tous envie d'être le meilleur élève et d'ajouter de nouvelles pages au livre de la sécurité aérienne.
Source LeFigaro.fr - Fabrice Amedeo - 24 janvier 2011
Sécurité des vols : Le rapport dévoilé aujourd'hui
Air France-KLM dévoilerait ce lundi un rapport très attendu sur la sécurité, affirme le site Internet du 'Wall Street Journal'. Ce rapport externe, confié à 8 experts indépendants, tirerait des conclusions très critiques au sujet des pratiques passées de la compagnie aérienne française en matière de sécurité, et notamment sur ses procédures de contrôle interne, affirme le quotidien américain.
Reporté de la fin 2010 à courant janvier, ce document devrait constituer un élément déterminant pour décider de l'inculpation ou non d'Air France par Sylvia Zimmermann, la juge d'instruction chargée de l'enquête judiciaire sur le crash du vol Rio-Paris AF447, qui avait fait 228 morts en juin 2009...
Source : Boursier.com - 24 janvier 2011
Sécurité des vols : Bulletin d'alerte sur les sondes Pitot de l'A330
A priori anodine, l'information pourrait bien relancer les spéculations sur les causes du crash du vol Rio-Paris d'Air France, en juin 2009. Airbus a envoyé hier à toutes les compagnies aériennes exploitant des A330 et des A340-200 et 300, un bulletin d'alerte opérationnel (OEB en anglais) pour rappeler à leurs pilotes de ne pas réenclencher le pilote automatique après un dysfonctionnement des sondes Pitot.
L'avionneur envoie régulièrement des OEB à ses clients et celui-ci rappelle une procédure prévue dans les manuels. Sauf qu'il concerne l'A330, l'appareil disparu au large du Brésil, et les fameuses sondes anémométriques Pitot, ces instruments de mesure de vitesse, suspectés d'avoir jouer un rôle déclencheur dans le drame du vol AF447. Mais, surtout, cet avertissement découle d'un élément nouveau, à savoir que deux sondes Pitot peuvent éventuellement envoyer les mêmes indications de vitesse erronées à l'ordinateur de bord, qui seraient susceptibles de provoquer des manoeuvres dangereuses en pilotage automatique.
Jusqu'à présent, la théorie veut que, en cas de dysfonctionnement de deux des trois sondes présentes sur un avion, provoqué par exemple par givrage, les données envoyées à l'ordinateur de vol soient suffisamment incohérentes pour que celui-ci décide de déconnecter le pilotage automatique et de rendre la main aux pilotes, jusqu'à ce que les sondes se remettent à fonctionner normalement. L'ordinateur proposera alors de revenir en pilotage automatique.
Un risque suffisamment sérieux
A cet instant, la procédure requiert toutefois une dernière vérification manuelle de la part des pilotes, qui doivent s'assurer, avant de réenclencher le pilotage automatique, que les indications de vitesses fournies par les sondes sont cohérentes avec les autres paramètres du vol. C'est sur cette ultime vérification que l'OEB d'Airbus insiste. Les études menées par l'avionneur ont en effet mis en lumière la possibilité pour deux sondes Pitot d'émettre des données erronées, mais néanmoins suffisamment cohérentes pour être jugées valides par l'ordinateur de vol. Si les pilotes ne se méfient pas et enclenchent le pilotage automatique sans plus ample vérification, tout peut alors arriver.
Rien ne permet d'affirmer à ce stade que le scénario soit derrière le crash de l'AF447. Sa probabilité est a priori très faible et il faudrait, de surcroît, que l'équipage n'ait pas suivi la procédure. Mais cela n'a rien d'impossible. Chez Airbus, on affirme que cet OEB n'a aucun lien avec la catastrophe. L'avionneur juge toutefois le risque suffisamment sérieux pour justifier non seulement un bulletin, mais aussi une modification du logiciel de pilotage automatique des 1.200 A330-A340 en service. Peut-être le résultat de la quatrième campagne de recherche des boîtes noires, en février prochain, permettra-t-il de percer le mystère.
source : Les Echos - Bruno Trévidic - 21 décembre 2010
Sécurité des vols à Air France : Le rapport sur la sécurité remis en janvier
Le rapport de mission sur la sécurité à bord des vols Air France, qui avait été lancé suite au crash du Rio-Paris, sera finalement remis en janvier au lieu de l’être à la fin de cette année, comme prévu initialement.
Ce rapport sur la sécurité à bord des vols Air France conditionnera sans doute l’inculpation ou non d’Air France par Sylvia Zimmermann, la juge d’instruction chargée de l’enquête judiciaire pour le crash de l’AF447, s’il se révèle que des défaillances en la matière sont réalité. En outre, le rapport, mené par 8 experts indépendants, ambitionne de donner « des pistes devant constituer des axes d’amélioration de la sécurité des vols, priorité absolue d’Air France ».
D’après un porte-parole d’Air France, ce retard d’un mois doit permettre de « donner à la mission externe le temps nécessaire à la finalisation de son rapport ».
Il rajoute qu’Air France « attend de ce rapport des recommandations constructives, sans complaisance, qui contribueront à porter la sécurité des vols de la compagnie au plus haut niveau des standards de l’industrie ».
Cette annonce intervient alors que le syndicat Alter a dénoncé Air France il y a quelques jours d’avoir fait voler un Boeing 747 alors que la sécurité du vol n’était pas totalement assurée en raison d’une maintenance (des couches de peinture sur une porte) « qui pouvait ne pas être conforme aux spécifications de Boeing ».
L’agence européenne de la sécurité avait finalement émis un avis favorable.
Rappelons aussi que le jeune syndicat Alter, créé à la disparition d’Air Inter, a été le premier avec d’autres syndicats minoritaires d’Air France à réclamer davantage de transparence dans la sécurité de la compagnie après le crash de l’AF447 qui a fait 228 morts. Il réclamait par exemple que les différents syndicats puissent siéger dans des missions d’audit après le crash de l’AF447 ou d’avoir accès aux Air Safety Report (ASR), rapports d’incidents des pilotes à l’issue de leur vol.
Source : AirJournal - Joël Ricci - 11 décembre 2010