Sarkozy, Proglio, Air France : Anne Lauvergeon règle ses comptes

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Nicolas Sarkozy « m'a dit : ‘‘Alexandre de Juniac est un ami, mais il n'a pas le niveau, il ne sera jamais président d'Air France. Il faut être sérieux'' », rapporte Anne Lauvergeon

Anne Lauvergeon sort l'artillerie lourde. A quelques jours de l'élection présidentielle et à l'occasion de la publication de son livre « La Femme qui résiste » (Plon), l'ancienne patronne d'Areva règle ses comptes dans une interview choc à « L'Express ». De Nicolas Sarkozy à Henri Proglio, tout le monde y passe.

Interrogé sur Nicolas Sarkozy, « Atomic Anne » lâche : « Début 2007, il m'avait confié qu'il serait élu, qu'il ne ferait qu'un mandat, puis qu'il irait gagner de l'argent chez Bouygues. » Ailleurs, elle critique sa volonté de vendre du nucléaire à des pays peu recommandables. « Par exemple au colonel Kadhafi... Imaginez, si on l'avait fait, de quoi nous aurions l'air maintenant ! [...] A l'été 2010, j'ai encore eu, à l'Elysée, une séance à ce sujet avec Claude Guéant et Henri Proglio. »

Montrées du doigt, les relations du chef de l'Etat avec ce dernier : « Saura-t-on un jour pourquoi le patron d'EDF a eu ainsi table ouverte à l'Elysée durant tout ce quinquennat ? » Que reproche l'ancienne patronne d'Areva au PDG d'EDF ? « A lui personnellement, rien. A ses méthodes, beaucoup de choses... A peine nommé, il a critiqué publiquement la filière, qu'il connaissait fort peu, prônant le démantèlement d'Areva. Pour se sentir aussi fort, il fallait bien qu'un axe d'airain se constitue, fait de politiques et d'intermédiaires, afin de servir ses intérêts. » Dans le nucléaire, Nicolas Sarkozy « a laissé s'organiser un système de clan, de bandes et de prébendes », accuse-t-elle.

Alexandre de Juniac, qui préside Air France, en prend lui aussi pour son grade. Nicolas Sarkozy « m'a dit : ‘‘Alexandre est un ami, mais il n'a pas le niveau, il ne sera jamais président d'Air France. Il faut être sérieux'' », rapporte Anne Lauvergeon, à qui le président de la République avait proposé un ministère en 2007 - avant qu'ils ne se fâchent. Lequel ? « Celui que je voulais. » Mais l'ancienne sherpa de François Mitterrand dit avoir refusé son offre car « il ne composait pas un gouvernement, il recrutait pour un casting ».

Anne Lauvergeon, qui épargne son successeur Luc Oursel, explique enfin avoir « une infirmité qui [la] sauve » : « Je n'éprouve jamais de haine. »

source : http://www.lesechos.fr